La sécurité en France-Afrique : entre farce et sommets

Article : La sécurité en France-Afrique : entre farce et sommets
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18 novembre 2013

La sécurité en France-Afrique : entre farce et sommets

crédit photo: abidjan.net
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Depuis l’implosion et l’assassinat de Kadhafi en octobre 2011, l’Afrique de l’Ouest et celle du Sahel sont confrontées à une recrudescence des violences et de l’insécurité sur le Vieux Continent. Malgré les réformes du secteur de sécurité en Côte d’Ivoire, au Mali et l’avènement d’une démocratie bancale en Libye, il est temps pour « Mère France » de couver ses œufs économiques en Afrique, de sauvegarder ses intérêts. La sécurité intérieure de la France est devenue plus que liée à sa filleule de toujours l’Afrique au point que menacer l’Afrique, c’est menacer le territoire français. Entre le chaos des milices basées en Libye et en Centrafrique qui sème la zizanie et crée une zone grise en Afrique et le sommet de sécurité du continent encore réfléchi sur les parvis de l’Elysée, quel pas s’avère nécessaire pour une Afrique plus pacifiée ?

A quand la sécurité sur le Vieux Continent ?

Que dire d’une actualité qui taxe l’Afrique de continent le plus vulnérable au Monde ? Bien qu’exagérée, l’actualité nous montre un tableau assez sombre. Entre l’enlèvement du numéro 2 des renseignements libyens Ali Zeidan et l’invasion-expédition du commando américain pour extirper l’un des barbus djihadistes Abous Anas Al-Libi, le vide sécuritaire se creuse. De la même manière que l’Etat malien peine à sécuriser le Nord, l’Etat libyen a octroyé sa fonction régalienne de sécurité du territoire aux différentes milices.

Plusieurs milices ou groupes armés contrôlent les alentours de Tripoli et se vouent une haine féroce. Des civils armés à bord de pick-up munis de canons antiaériens cherchent à prendre le contrôle de la capitale. A cela s’ajoutent une police et une armée formée d’anciens miliciens, de combattants à la volée qui n’ont reçu aucune formation. C’est le même tableau qu’on retrouvait en Côte d’Ivoire et même actuellement avec des miliciens qui faute de jouer à des attaques armées sporadiques contre des barrages ou postes de gendarmerie se sont mués en véritables bandes de coupeurs de route.

Des morts, on en compte depuis la Libye jusqu’au Nigeria en passant par le Niger, la Mauritanie, la Côte d’Ivoire, la Centrafrique et le Mali. Loin d’exiger une armée blindée jusqu’aux dents qui assure la sécurité totale sur la terre de nos ancêtres, je voudrais attirer notre attention sur le détournement de la mission de ces forces de l’ordre. Les chefs d’Etat ont transformé les forces de sécurité et de défense en milices privées pour les servir ou plutôt leurs intérêts. Ceux qui doivent sécuriser l’Etat deviennent ceux qui le menacent.

En Côte d’Ivoire, au Togo, j’ai pu voir combien les citoyens ont une peur psychologique devant un treillis militaire. Le soldat est devenu plus symbole de menace que symbole de protection. Sa mission est de confirmer son patron-président au pouvoir. Le citoyen est un mal nécessaire, une cible à éliminer pour servir l’intérêt de la « nation ». Tabasser est le mot d’ordre, obéir est la seule solution. Comme un troupeau qui suit son maître, la réforme du secteur de sécurité a été une longue formation (Côte d’Ivoire, Mali) qui a fait somnoler beaucoup de dignitaires militaires et bailler d’autres. La force fonde le droit, celui qui a la mitraillette se fait respecter. En conséquence, la Patrie-défenseure des droits de l’homme et de la sécurité de « ses » compatriotes va venir à la rescousse de l’Afrique.

La France, gardienne de l’Afrique

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Valls et IBK
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En 2010, il est recensé 224 831 Français installés en Afrique. Trois ans plus tard, il est possible qu’on dénombre avec les départs et entrées environ 225 000 Français. Et pourtant, les médias occidentaux clament que l’Afrique est plus instable que jamais. Elle est instable, mais hospitalière vu la dernière tournée du ministre de l’Intérieur Manuel Valls. Après le Sénégal, la Côte d’Ivoire, c’est au tour du Mali de le recevoir. La farce continue en Afrique et continuera toujours d’autant plus qu’un ministre de l’Intérieur français est systématiquement accueilli par les présidents !!! Depuis quand nos ministres africains sont reçus par François Hollande dont l’emploi du temps est chargé ? Valls est reçu en audience par Macky Sall, Alassane Ouattara, et Ibrahim Boubacar Keita.

On remarque bien que cette visite est stratégique d’autant plus que ces pays accueillent les plus importantes bases militaires françaises en Afrique de l’Ouest. Le comble dans la visite en Côte d’Ivoire, c’est que l’on profite de la présence de Valls pour souligner les « relations de confiance » ou le lien « naturel » qui lie la France à la Côte d’Ivoire et exprimer la gratitude du Chef de l’Etat pour la sécurisation du territoire ivoirien par la France à travers une décoration de « Commandeur de l’Ordre national de Côte d’Ivoire ».

Et la farce continue. L’ambassadeur français a même plus de poids et d’entrées à la présidence ivoirienne que quiconque. En retour, 500 armes légères seront offertes par Paris contre le « grand banditisme » pour réformer le secteur de sécurité. La sécurité est plus efficace quand elle est assurée par la France, croirait-on. Du terrorisme au grand banditisme des routes en passant par les trafiquants de drogue, la France réitère sa politique sécuritaire à travers un plan Sahel piloté depuis Dakar. France-Afrique, franc de l’Afrique, c’est un cocktail bien préparé par Valls que servira son patron François Hollande au sommet de l’Elysée pour la paix et la sécurité en Afrique. La plupart des Etats francophones sont déjà au garde-à-vous et prêts à suivre leur mentor. Pendant ce temps, des Africains se débrouillent eux-mêmes pour garantir leur propre sécurité.

La sécurité de l’Afrique par les Africains.

La sécurité en Afrique plus spécialement en Côte d’Ivoire est dans les mains des petites agences de gardiennage. « Bravo 1 à Bravo 2 » entend-on dans leur talkie-walkie. Les habitants ont mis leur confiance plus dans le treillis jaune que dans le treillis militaire.  Au niveau continental, les dissensions politiques entre les grandes puissances militaires comme le Tchad, l’Algérie, le Nigeria, l’Afrique du Sud et la course au leadership ne favorisent même pas la création d’une véritable force africaine. En conséquence, aucune décision n’est prise sans le négociateur France ou le vrai guerrier des nombreux trafics d’armes, de drogue. Les pays africains ont tant à gagner à se réunir, à allier leurs forces militaires. Entre corruption et trafic de toutes sortes, chacun veille sur son grain. La jungle a pris le dessus et il vaut mieux avoir la force pour rester en vie. Quel enfer de plus pour nous rendre plus vulnérables devant l’immensité des menaces grandissantes !!!

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