La fièvre électorale d’avant 2015 en Afrique de l’Ouest : perspectives et vérités

16 février 2014

La fièvre électorale d’avant 2015 en Afrique de l’Ouest : perspectives et vérités

Messieurs les Excellences

Il demeure flagrant de constater que dans notre continent Africain, les élections demeurent et continuent de demeurer non seulement un enjeu de vie ou de mort mais aussi une affirmation du sentiment d’éternité. Autour des élections se forme une machine très complexe d’opposants et de parti traditionnel au pouvoir, de tractations et de stratégies rusées, de réflexion et d’actions. Tout cela peut être représenté sous l’image connotative et réelle d’une fièvre avant la maladie elle-même. L’année 2014 ne vient que de débuter à ses premières heures mais il semble qu’elle est déjà achevée vues toutes les projections et assurances que posent les acteurs politiques dans ce futur proche. En Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Nigéria (Février 2015), au Togo et même en Algérie, il est évident de sentir les soubresauts causés par la fièvre des élections. Les véritables questions sont occultées : il ne s’agit plus de s’interroger sur le bilan de ces actions passées, de faire le point sur le parcours en tant que chef d’Etat ! Non ! Il s’agit de vaincre et de gagner par tous les moyens. « Gagner ou Gagner », le verbe « perdre » n’existe pas dans le langage politique. Il importe pour nous de faire une analyse comparée de la période préélectorale dans trois pays à savoir le Togo, la Côte d’Ivoire et le Burkina afin de saisir la phénoménologie et la relativité du « sentiment d’éternel pouvoir » dans ces pays.

 

La logique du pouvoir : Gagner ou Gagner

Une caractéristique principale de la période préelectorale est la violence des mots, la violence des manigances, une violence polie, cachée qui s’extériorise dans la période post-électorale. D’une manière générale, telle est le point convergent qui rassemble ces pays et présidents frères : le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire et le Togo. L’actualité du Burkina Faso est un exemple patent. Le président Blaise Compaoré ayant déjà brigué 4 mandats veut se présenter à l’élection de 2015. L’article 37 de la Constitution burkinabè (une copie conforme et plate de la Constitution française) limite à deux le nombre de mandats présidentiels consécutifs à raison de 5 ans par mandat. En effet, après des modifications de la durée du mandat (7 ans à 5 ans) en 2000, le président s’est encore présenté deux fois en raison d’une non-rétroactivité de la loi c’est-à-dire qu’une non application effective de cet article modifié qu’après son 2ème mandat. Le 21 Mai 2013, 81 députés contre 46 ont voté la création d’un Sénat dans le but de créer une Chambre de représentants à la solde de ses intentions. A suivi un mouvement de colère, des manifestations d’opposants dans l’ensemble du pays pour protester contre cette loi. La logique du gagner semble être un virus qui papillonnent la vie des chefs d’Etats africains. Malgré la démission (fictive ou pas) du parti au pouvoir (Congrès pour la démocratie et le progrès) de 75 de ses affidés (conseillers, ministres) pour créer un parti politique le MPP (Mouvement du Peuple pour le Progrès, l’heure est toujours aux pourparlers, aux vaines médiations. On se demande si une médiation doit se tenir d’autant plus que la vérité ici n’est point subjective, elle ressort des textes sur lesquels le pouvoir a prêté serment et juré de défendre. Et la farce des hommes noirs continue. C’est le pays ami (la Côte d’Ivoire) qui envoie ses hommes de main « renouer le dialogue entre les anciens camarades, les démissionnaires, les responsables et autres chefs des partis politiques. » Pour paraphraser un dicton, l’erreur d’un homme est tolérable, mais la solidarité dans l’erreur est diabolique. La médiation est devenue l’arme pour légitimer l’intérêt des plus forts. La médiation interne piétine du fait simplement du non-lieu de cette médiation. Je pense qu’en Afrique, nous devons avoir honte de parler de médiation quand le médiateur est partial ou qu’un acteur de la médiation s’est déclaré hors-jeu de par l’incohérence de ces actes. La farce continue de durer en Afrique, et je ne sais au prix de quels intérêts, l’arrêt d’un régime presque éternel peut être un tort pour un pays. Quant au Togo, c’est la limitation du mandat présidentiel qui bouillonne les consciences. Le parti au pouvoir laisse moisir le vague article 59 de la Constitution Togolaise sur le nombre de mandat présidentiel. « Le président de la République est rééligible ». C’est dire que Faure Gnassingbé souffre moins des violents maux de tête pour réfléchir sur son lendemain politique plutôt que celui de son homologue Blaise Compaoré. Les maugrées et bourdonnement d’une alliance de l’opposition qui peine à se former ne l’inquiète en aucun point.

Bref, c’est le temps des alliances politiques. Durant la première partie du mandat, les partis de l’opposition rejettent les résultats des élections présidentielles. Ils appellent aux fraudes électorales et à la révision des voix ; la seconde partie consistera à critiquer le pouvoir en place sans réellement mettre en place des structures capables d’aider le peuple à sortir de la misère : en ce sens, leur presse privée et média auront tous les thèmes et critiques à resasser ; dans la seconde et dernière partie du mandat, on dirait que le climat politique est devenue une course à relais : les partis de l’opposition cherchent tant bien que mal à réunir leurs forces déjà usées à de vaines logorrhées. En Côte d’Ivoire, le FPI de Pascal Affi N’Guessan  cherche à créer son bloc unique mais peine à fédérer les 14 autres partis à la même cause. Et ceci à cause du quota d’intérêts que chaque parti gagnera à la victoire.

Un scenario pareil au Togo où les partis radicaux de l’opposition comme l’ANC ont adopté une tradition de marches et manifestations en scandant « Faure must go !!! 50 ans, c’est trop, 10 ans, ça suffit ». les meetings se succèdent chaque samedi ralentissant les affaires économiques du pays (grand marché). Le rouge est la couleur de rigueur et les imprécations des mamans Femen ( Femen togolaises) pourront suffir à éliminer le parti  au pouvoir UNIR. C’est dans ce climat politique délétère qu’est lancé un « Appel des patriotes » faiblement entendu par les différentes forces de « l’alternance ». il s’agit de créer une coalition dont le programme sera de « définir le projet de société, ainsi que la répartition des rôles, voire des postes, après la conquête du pouvoir». Le front pour l’Alternance peine encore à se former surtout après la large victoire du pouvoir aux dernières législatives.

Diviser pour mieux régner, construire l’illusion par les projets

La fièvre électorale ne comporte pas seulement des enjeux politiques. L’argent est le nerf de la guerre. L’économie est la grosse part de l’iceberg. Il s’agit de frapper les consciences, de montrer que le pays se développe, et accueille les investisseurs. Il semble qu’avant les élections, la terre tremble et des infrastructures sortent miraculeusement du sol. En témoignent les grands axes routiers qui traversent Lomé, « la mise en œuvre de programmes pour l’emploi des jeunes, l’amélioration des finances publiques, le Fonds National de Finance Inclusive permettant la création d’AGR » (Activité génératrice de revenus.) A Abidjan, les chantiers sont énormes : un troisième pont Henri Konan Bédié pour la ville d’Abidjan reliant les zones sud de la ville à Marcory au Nord(projet initié depuis 1999), l’échangeur de la Riviera II appelé échangeur moderne de trois niveaux, la construction de 2000 logements sociaux. L’heure est à la reconstruction, à la réhabilitation, à la séduction des investitsseurs et ce serait bien ingrat voire inimaginable d’abandonner le pouvoir en plein milieu de l’action !!! Mais quand même !!! En plus si des enjeux géostratégiques et militaires dépendent du maintien d’un président qui a déjà fait 22 ans au pouvoir et qui sait manier la carotte et le bâton pour calmer djihadjistes et islamistes, mutins et milices, opposants et partis au pouvoir, QUELLE BETISE POURRIEZ-VOUS AINSI COMMETTRE EN LE METTANT DEHORS ? L’Afrique de l’Ouest continue de souffrir de la farce d’opposants frivoles et de présidents à vie. C’est avec pleine adhésion que je réponds à cette citation de Machiavel : « Le but du prince est de conquérir le pouvoir, de le conserver et de rester en vie ». Et la farce continue….

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